Une chanson écrite le 5 Juin 1999 et qui est plus que jamais d'actualité :

LE FRIC

 

On a fabriqué des églises

Des grands palais, des cours d’assises

Pour lui

On a dessiné des frontières

Et rangé la paix aux vestiaires

Pour lui

On a façonné un mur entre

Les ventres creux et les gros ventres

Pour lui

La bonté n’est plus qu’une enclave

Un fœtus un futur esclave

Pour lui

 

Lui que l’on prie tous à genoux

A qui l’on offre tant de vies

Commandant au dessus de nous

Les manettes de nos envies

Le Dieu, le seul, le vrai, l’unique :

LE FRIC !...

 

Tout le monde reprend en chœur

L’air du travail à contre cœur

Pour lui

On se fait voleur, pute ou pire

On marchande tous nos soupirs

Pour lui

Asservi, aveugle et muet

Devant ces misères créées

Pour lui

On se dégonfle, on s’accroupit

En renonçant à l’utopie

Pour lui

 

Lui le magicien qui transforme

Les chefs d’état en marionnettes

Pour ces démocraties conformes

A ses idées de proxénète

Le Dieu, le seul, le vrai, l’unique :

LE FRIC !...

 

On a violé Dame-Nature

Anéanti notre futur

Pour lui

On a rendu folles les vaches

Qui sans le savoir s’entre-machent

Pour lui

Ô philosophie du profit

L’oxygène se raréfie

Pour lui

On va crever avec le monde

Noyé sous notre merde immonde

Pour lui

 

Lui qui est au dessus de tout

Du paradis et de l’enfer

Qui a fait d’Allah sont toutou

De Jésus sa bonne à tout faire

Le Dieu, le seul, le vrai, l’unique :

LE FRIC !...

 

© Paroles & Musique : Eric MIE 1999

 

Une vieille chanson, restée inédite à ce jour, écrite le 11 Octobre 1998. Je l'avais envoyé à Magyd.

 

LA BANLIEUE A CENT LIEUES

A Magyd Cherfi

 

Je ne connais pas la banlieue

Et pour taguer c’est pas le lieu

Je connais quand même la haine

L’exclusion, la C.P.P.N.

Je ne connais pas les étages

Notre ghetto est un village

Je connais quand même l’ennui

La province : ils s’en foutent aussi !...

 

Refrain :

La capitale a sa banlieue

La banlieue a la sienne aussi

Ça ne pourrit pas qu’au milieu

L’ennui se déplie jusqu’ ici

 

Les beurs d’ici n’ont pas le rap

Ils passent quand même à la trappe

Chez les pecnos : les immigrés

Ne sont pas prêt d’être intégrés

Les gros médias : radio, télé

Sont souvent dans vos quartiers laids

Dans notre trou on peut crever

D’ailleurs on crève au champ de blé !...

 

Malgré sa beauté et sa faune

Notre campagne c’est la zone

Misère, chômage et surtout

Gros cons de droite un peu partout

A coup d’ couteau j’irai graver

Sur l’écorce du châtaignier :

« Je nique l’état de fumier

Et le fascisme du fermier ! »

 

La nuit pas de feu de bagnole

Juste un vieil alcoolo qui viole

Tout le monde est au courant mais

Il faut apprendre à la fermer

Un jour je l’ouvrirai peut-être

Ils fermeront tous leurs fenêtres

Alors avec mon lance-rage

Je brûlerai tout le village !...

 

 

 © Paroles & Musique : Eric MIE 1998

Voici quelques nouvelles écrites par Eric Mie entre 1992 et 2000 à l’époque où il voulait devenir Marcel Aymé… Aujourd’hui il sait qu’il ne sera jamais Marcel Aymé. Par contre certains « amis » le nomme Rémy Bricka… allez savoir pourquoi…


LE DERNIER MOT


À Jean-Baptiste Dolard


Jean-Baptiste Le Halley, fameux thanatophobe, est assis face à son père, les bras croisés sur la table en Formica de la cuisine entomophage. Une triste ampoule scintillante les éclaire faiblement. Une grosse mouche, velue et à-la-con, danse autour de leurs têtes, en chantant une malicieuse comptine digne des plus beaux poèmes de Raymond Queneau. Ils ont chacun un verre de poison devant eux. La rage au ventre, la douleur de vivre et le désespoir leur tiennent joliment compagnie. Tous les deux se sont mis d'accord pour quitter la condition humaine de cette façon. Ils ont tout bien préparé pour que cela se passe sans aucune anicroche. Ils ont envoyé Mme Le Halley acheter du "Thé des chartreux" prétextant un début d'état comateux et de bronchite. Florentine Le Halley, étant niaise comme une souche, a exécuté l'ordre sans demander son reste. Le père, Bienvenu Le Halley, pour installer ce sombre climat idéal aux instants suicidaires (répétez huit fois cette phrase à haute voix et demandez vous si elle est vraiment nécessaire), dit:
- Fils Le Halley, nous allons boire ces deux verres en même temps et, trente minutes après, nous nous éteindrons comme de vulgaires lampes torches des non moins vulgaires spéléologues.
Jean-Baptiste, croyant être prêt, lui rétorque solennellement:
- Partir loin des humains est notre souhait, "rien ne sert à rien" notre devise, le poison notre moyen, alors buvons à notre but!
Puis son père rajoute, pour avoir le dernier mot et citer Chaval (que vous devriez lire entre deux bons livres de Jean Richepin):
"Vive la putréfaction, premier degré vers la sagesse, vive la mort." ...
Puis J.B. rajoute, pour avoir le dernier mot
- Oui, tu as raison
Puis son père rajoute, pour avoir le dernier mot
- Un peu mon neveu
Puis J.B. rajoute, pour avoir le dernier mot
- Je ne suis pas ton neveu
Puis son père rajoute, pour avoir le dernier mot
- Tu parles Charles...
Puis J.B. rajoute, pour avoir le dernier mot
- Je ne m'appelle pas Charles
Puis son père rajoute, pour avoir le dernier mot
- C'est vrai.
Puis J.B. rajoute, pour avoir le dernier mot
- Oui... bon...
Puis son père rajoute, pour avoir le dernier mot
- Bon bah c'est pas tout ça...
Puis J.B. rajoute, pour avoir le dernier mot
- Hum hum...
Puis son père rajoute, pour avoir le dernier mot
- Tu tousses?...
etc.
Après cet et cetera, Jean-Baba et Nunuche, pour faire plus court et plus cool, avalent d'un trait le venin paralysant à la manière des russes, d'un coup sec et en jetant le verre vide derrière soi, massacrant du même coup, la grosse mouche Queneauophile.
Papa Le Halley décide de s'endormir, "la mort n'en sera que plus douce" songe-t-il. Jean-Baba, lui, ne s'endort pas, il pense...
DERNIERE GRANDE ERREUR!... car penser a toujours été l'ultime bévue, et puis comme on dit chez moi: "penser avant de mourir c'est un peu comme crever avant de partir" ... (...c'est un proverbe de chez moi, ne critiquez pas).
Il pense qu'il n'a plus que trente minutes à vivre et que c'est bien court. Il pense aussi qu'au bout de ces trente minutes il ne sera plus rien, qu'il connaîtra le vide absolu et que, comme on dit chez moi: "on sait c'qu'on perd, jamais c'qu'on gagne!"... (oui je sais...) Il pense à la joie qu'il avait de lire Chaval et Jean Richepin. Il pense à ses longues promenades joyeuses, en compagnie de Césarine, dans les hautes herbes d'Essey-la-Côte. Il pense à l'amour, qu'il ne pourra plus jamais éprouver, et au plaisir de manger, qui va être anéanti.
Finalement, il pense qu'il ne veut plus mourir.
Bienvenu dort et s'en va peut être déjà...
- NON! C'EST TROP CON!...
Le père sursaute, réveillé par ce cri d'épouvante, et dit:
- C'est peut être trop con mais c'est sûrement trop tard.
"C'est encore lui qui a le dernier mot" pense Jean-Baptiste avant de sombrer éternellement dans l'abîme du néant.
Et l'abîme du néant, c'est rien.

 

LA TÊTE


''Conte à dire à haute voix comme si vous étiez sur une scène.

À qui vous savez ''

 

Sur un socle et au beau milieu de la place publique d'une ville quelconque mais importante, un homme dépose une tête coupée. Cette tête coupée gêne tous les passants...non pas parce qu'elle est coupée, non, tout simplement parce que les gens trouvent que la tête ressemble à la leur... Du notaire au chômeur, tous ressemblent à la tête coupée!!...
Alors, par peur d'être reconnus, les habitants de la ville quelconque mais importante, se maquillent, mettent de fausses moustaches, des perruques, des faux cils...etc. Mais en vain, ils ont beau faire tout ce qu'ils peuvent pour ne pas lui ressembler c'est peine perdue, car ils sont toujours le fidèle reflet de la tête coupée.
Ils mettent donc la tête et son socle sur une autre place publique, dans une autre ville quelconque mais importante. Mais les habitants de l'autre ville ont exactement le même problème, tous lui ressemblent!...
Même en lui retirant le persil du nez, la tête coupée ressemble à toutes les autres têtes bien vivantes.
"Mais qui donc a eu l'idée de mettre cette tête sur la place publique?...et à qui appartenait cette tête?" se demande le très vieux maire de la ville maquillé pour ne pas lui ressembler...
"A moi!, répondit un homme sans tête au milieu de la foule, j'étais terriblement triste alors j'ai décidé d'en finir et je me suis tranché la tête..."
Un "hooooooo..." de consternation se fit entendre...
"Bah voui, reprit le sans-tête avec un cheveu sur la langue, je me sentais seul..."
Et les gens, sans même se poser la question de savoir comment il parlait (puisqu'il n'avait plus de bouche) le consolèrent en lui disant: "mais nooonnn, t'es pas tout seul..."
"Mais comprenez moi, reprit une nouvelle fois le sans-tête, je ne supportais plus de voir ma tête dans la glace...car, je ne sais pas si vous avez remarqué, j'avais quand même une effroyable tête de con..."

 

GLOIRE


Con conte pour rien


Quand on me dit “Gloire” je pense tout de suite à un loir car je prononce rarement les G.
Quand j’étais petit j’ai apprivoisé un petit loir trouvé dans la baie de San-Francisco à l’époque où nous vivions là à cause du boulot de papa. Hé oui mon père était aventurier professionnel et, il est évident, que pour les besoins de sa fonction il était obli'é d’aller à San Francisco ou à Honk Kon', ou dans L’himalaya ou dans le désert des carpates. On n’ima'ine point un téméraire héros sauver une créature de rêves, avec des ‘ros nichons, des bras d’une bande de rudes cannibales, ou un surhomme super bronzé plon'er du haut d’une falaise nue pour sauver un sous-marin qui se noie à Champenoux, à Roville-aux-chênes ou à Sneck-en-Bouche. Donc pour exercer son difficile métier d’aventurier mon père était amené à voya'er beaucoup. Il travaillait, à l’époque, pour le compte de la, si peu connu, république Américaine de France. Et j’ai donc apprivoisé là-bas, pour revenir à nos moutons, un petit Loir que j’ai baptisé Barnafouette.
Nous habitions alors dans une ‘rande Maison ‘réco-romaine aux murs ornés de plantes ‘’rimpantes. Et avec Barnafouette nous nous amusions souvent, entre deux ‘renadines, à ‘ravir ses long murs en ri’olant comme des ‘o’oles. Tandis que mon Père, au loin, lançait des ‘renades en ‘ro'nant de haine sur les ‘ros et ‘rotesques communistes qui ‘aspillaient tout. Ô que j’aimais Barnafouette qui était alors mon seul et unique ami. Je ne devrais peut être pas l’avouer mais souvent les nuits j’enfilais une ‘uépière et un soutien ‘or'e et je lui caressait le ‘land en ‘eulant comme un ‘uépard car barnafouette était ‘albé comme une ‘racieuse ‘uenon.
Vous l’aurez sans doute remarquez cette nouvelle est remplis de A. De A !... je veux de dire de situation à effet comique, les fameux ‘A’s !...
Mais malheureusement tout à une fin et un jour que mon père rentrait à la maison en sautant en parachute au dessus de la maison il écrasa Barnafouette comme une 'rosse merde et depuis j’ai comme un 'rand vide dans mon coeur. Je sais que ce n’était pas de la faute de mon père mais je lui en ai toujours un peu voulu. Et mon père l’a ressenti. Il n’était plus ce ‘aillard ‘alapant ‘aie et fou’eux qui terrorisait les ‘ans’tèrs. Il ne sauvait plus les superbes créatures à ‘ros nichons avec autant d’entrains qu’avant. Si bien qu’un jour il tua la fille et viola le communiste au lieu de faire la réciproque. Il continua mal’ré tout ses aventures. Sa toute dernière étant sa remonté d’un célèbre fleuve française à la na'e avec les pieds et les mains liés. Mais, malheureusement, un hélicoptère volant trop près de sa tête la lui arracha en deux coups d’hélices. Le lendemain de cette mésaventure les journalistes ont écrit qu’il fut fauché en pleine Loire.

Depuis, sur sa terne triste tombe en tôle, il y a souvent des ‘rafitis qui disent “Bien fait pour ta ‘eule signé barnafouette le fantôme”.

 

MADAME BRICOLAGE


Petit conte pour jeune fille de bonne famille de Melle Erika Miette


Mesdames, mesdemoiselles et mes bien chères sœurs, aujourd’hui ma fiche bricolage concernera un objet facile à monter, en un tournemain, et qui vous ravivera toutes : l’homme objet.

Alors comment si prendre pour obtenir une table basse humaine pour y faire reposer nos petits pieds mignons mais bien fatigués après une longue journée de bureau ou une table à apéritifs humaine pour nos délicieuses soirées entre copines par exemple.
Et bien tout d’abord il faut bien choisir l’homme. Il doit être malléable à souhait c’est à dire assez romantico-naïf pour aller à toutes vos flûtes. Évitez donc tout de suite les individus bruyants et obsédés car ils n’ont point de cœur. Or il faut un assez énorme cœur. Car c’est avec l’aide de cet organe que vous arriverez à obtenir ce que vous voudrez. Il faut également le choisir à l’âge où la désillusion amoureuse n’a pas encore fait ses néfastes ravages. Evitez donc les hommes âgés, les alcooliques ainsi que les experts-comptables.
Quand vous pensez avoir trouvé l’homme glissez lui à l’oreille les mille et une voluptés que vous allez lui offrir si il daigne bien vouloir vous suivre jusque chez vous. Vous trouverez ses mille et une voluptés dans notre catalogue, en vente par correspondance, ou dans les replis de dentelles de nos sous-vêtements.
Quand il a bien la tête qui tourne, des étoile dans les yeux et l’air ahuri c’est quasiment dans la poche. Mais ne brusquez pas les choses tout de suite. Amenez le chez vous. Mettez sur votre chaîne un CD de Carla Bruni et dans votre lecteur de DVD un épisode de “Cat’s Eyes” et faite lui boire un truc de fille qu’il n’a pas l’habitude de boire, genre : un thé à la bergamote afin de l’attendrir encore un peu plus. Ensuite, faites le parler de sa vie en l’interrompant de temps à autre avec un sourire angélique. Si d’ici là, il ne vous a toujours pas fait la cour à genoux devant vous c’est que vous vous êtes trompée d’homme. Par contre s’il déclare sa flamme, dites lui que maintenant vous êtes fatiguée et qu’il faut qu’il vous laisse tranquille pour ce soir. Dites lui de votre voix la plus douce : “Je te trouve mignon mais s’il te plaît je préférerais que tu rentres chez toi ce soir... Tu ne m’en veux pas mon chicounet (s’ il s’appelle Chico ou mon martinet s’il s’appelle Martin). Refaite ce coup pendant 56 soirs puis à la 56 ème soirée juste après l’un de vos sourires angéliques, foutez lui une grande baffe dans la gueule et demandez lui la pose que vous voulez qu’il tienne. Hé voilà, vous avez pour 0 euro une superbe table basse en homme vivant ou un porte serviette.
Et à qui on dit merci mesdames, mesdemoiselles et mes bien chères sœurs ?
Mais à Madame bricolage bien entendu !

Demain nous bricolerons toutes pour obtenir un superbe homme-ménage lave-linge-et-vaisselle.

Alors à demain les filles !!!!

 

L’ARBRE au CŒUR


Petit conte pour enfant vosgien


Jadis au lieu du village de mon enfance, vivait une immense forêt où rochers, épineux, digitales et feuilles ouvraient un beau chemin qui menait à leur roi, au plus grand des arbres, au vieux sage : le chêne.
Tous les jours, un enfant traversait ce rideau de pins et de fougères pour le voir, l’admirer...
Il se couchait à ses pieds, lui posait quelques questions et le chêne lui répondait quand le vent se prenait dans la harpe de ses feuilles. Le vieil arbre le consolait de tous ses chagrins.
Et le temps, toujours impatient, avide de changement, chamboula tout...
Il apporta, en deux petites années, plus de paysans qu’il n’en fallait. Ce qui déplaisait fortement aux sangliers et aux renards, qui jusqu’ici n’avaient pas encore connu la peur. Les champs de blé, de maïs ou de tournesols se sont étendus et ont dévoré la plus grosse partie de la forêt. Un jour, l’un de ces paysans sortit sa hache, l’affûta et s’en alla au creux de cette forêt, devenu petite, pour abattre le grand chêne...
Il désirait avoir une maison tout en bois comme celle de son voisin le Joson qui n’arrêtait pas de lui dire : “Hé, t’as vu, j’ai une maison tout en bois comme celle de mon voisin le Denis...”
Arrivé devant l’énorme Roi de bois, l’enfant était là, juste devant son ami. Il avait le regard menaçant de la louve qui protège ses petits du fusil des chasseurs. Il avait un regard tellement effrayant que le paysan s’en retourna chez lui et se promit de ne plus jamais toucher à un seul arbre de sa vie.
_ Une maison de pierre, se disait-il, ça f’ra encore mieux dans le village... Et j’suis sûr que le Joson en s’ra jaloux.

Car un village se construisait, petit à petit, en mordant, une fois de plus, dans ce qui restait de la forêt. On construisit d’autres fermes et pour faire plaisir au curé, une église. Jaloux de cette église, Monsieur le Maire ordonna à ses habitants qu’on lui fabriqua une Mairie. Las de tous ces travaux, ils se fabriquèrent, pour leur propre plaisir, et fêter tout ça, un bon p’tit bistro.

Ainsi rien ne manquait au village si ce n’est un peu de bon temps... Car un village ça doit vivre, et pas seulement du travail des champs. Or les samedis étaient bien ennuyeux pour tous les paysans du village. Ils avaient bien des musiciens pour mener le bal mais ils n’avaient pas d’instruments. Alors un paysan s’improvisa luthier et demanda au bûcheron d’aller lui couper ce vieille arbre qui faisait beaucoup trop d’ombre dans la cour de l’école.
_ Allez, pousse toi d’là, gamin ! Tu vois pas qu’j’ai une hache dans la main... c’est dangereux, tu sais ?
_ Je sais. Mais je ne veux pas que tu touches à cet arbre.
_ Mais gamin, t’aimes bien danser, non ?
_ Oui...
_ Bah alors... C’est pour faire des violons, des guitares et des flûtiaux que j’le coupe.
L’enfant avait un regard tellement effrayant que le bûcheron s’en retourna chez lui et, du jour au lendemain, devint paysan. Il se promit de ne plus jamais toucher un seul arbre de sa vie.
Pour fabriquer les instruments, on empruntât quelques planches à la maison du Joson.

L’enfant qui, toute sa vie, s’est battu pour que son chêne ne soit jamais abattu, est devenu, au fil du temps et du hasard, mon grand-père.
Et les soirs où j’avais beaucoup trop de chagrin, j’allais le voir dans sa vieille maison, la plus vieille du village. J’allais me blottir contre son ventre chaud.
Savait-il qu’en me serrant si fort dans ses grands bras, il me consolait de cette orage aux quatre cent mille coups de grolle ?...
_ Qu’est c’qui t’fais pleurer, comme ça ?...
_ C’est la vie, pépère, c’est la vie...
_ ohff... Cela n’a pas d’importance...
Je me souviendrai toujours de cette pensée qu’il avait taillé dans un bout de granit. Un bout de granit qu’il avait trouvé abandonné au beau milieu du champ des trépassés... Je me souviendrais toujours de cette pensée...

Rien n’a d’importance si ce n’est l’arbre que tu trouves beau et que tu ne veux pas que l’on coupe.

 

UN VIEUX RÊVE PACHYDERME QUE ÇA !…


Un texte de 1992. Ah folle jeunesse !…


Un petit rien de bon matin où le café qui fume me titille les narines de son odeur torréfiée me réveille et me chante qu’un café bouillu c’est un café de foutu. Mes chaussettes qui traînaient la nuit à côté de mon lit sont mortes de trouille à l’idée de penser que je vais réenfiler mes pieds puant la sueur dans leurs corps noircis par la journée d’hier. Les yeux pleins de buée, les cheveux en nid de poule : me v’la !...
Mon bayement digne d’une alarme pour sourd m’étonne tant que j’éclate d’un rire encore plus bruyant. En ouvrant mes volets sur une journée ensoleillée, la radio m’apprend la finale d’une quelconque coupe de foot du monde qui a tourné en catastrophe avec pleins de morts et de blessés. Me voilà donc face à face avec mon bol de café et ma boite de « Cracotte ». Pour l’instant inutile de vous dire que c’est un matin banal.
Jusqu’au moment où un tremblement de terre bouge mon bol et renverse du café sur ma nappe propre d’hier. Pris de colère envers le créateur, je crie des mots grossiers en essuyant ma nappe à l’aide d’une éponge humide. C’est en regardant par ma fenêtre que je me rends compte de l’importance de ce tremblement de terre au-delà de la tache sur ma nappe. Dans les rues il y a pleins de cadavres et quand on est conscient de la surpopulation qui s’accroisse sur notre planète on ne peut que se réjouir à la vue d’un tel massacre.
Après ça, il me faut un deuxième café vu que le premier se trouve dans le ventre de l’éponge. C’est en finissant mon deuxième bol que je me rends compte que la radio ne fonctionne plus depuis le tremblement. Je crois d’abord que les vendeurs de chez « Darty » sont tous des terrines de jus de pine mais, bien que cela soit vrai, ce ne sont pas eux les responsables de l’arrêt des informations mais bel et bien le tremblement de terre vu qu’il n’y a pas plus d’électricité dans les hôpitaux que chez moi.
Si je choisis les hôpitaux comme exemple c’est qu’il y a des malades branchés sur des électrocardiogrammes et qu’ils sont sûrement morts à présent. Mais restons positifs comme le Pape en mettant à l’avant le problème de la surpopulation.
Je décide de descendre dans la rue prendre des photos de Charlélie Couture qui fait partie des cadavre Nancéens. Je glisse dans sa main froide un stylo et s’aidant de la mienne le célèbre mort me dédicace un disque de Carlos car je ne possède aucun de ses propres albums.
Puis je me promène dans les rues de Nancy en sifflotant une de ses chansons.
Je déshabille et contemple quelques cadavres féminins, une cigarette à la bouche et une main ailleurs. Je dévalise les librairies et les disquaires en passant par les sex-shops vu qu’aujourd’hui personne n’a pu me voir.
Vers 20h30, je rencontre une jeune petite rousse de 17 ans avec un petit cul rebondi et des bas noir et blanc rayés qui est dans le même état que moi : c'est-à-dire en vie !...
Nous avons ri toute la soirée avant de nous coucher sous un lampadaire éteint et fait l’amour toute la nuit.
Ce fut une agréable journée et maintenant, Alice et moi, nous avons plein de projets pour l’avenir. Notamment ne plus jamais repeupler le monde de ces êtres grotesques et méchants qu’on appelait les humains et le laisser aux pachydermes qui ont été les seuls, avec nous, à ne pas périr sous ce tremblement de terre mondial.

 

© Eric Mie